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Olympe de Gouges, Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne, 1791

Introduction 

Contexte : les femmes pendant la Révolution

 

Au XVIIIème siècle, sont relancées les luttes des femmes contre les inégalités que leur impose le pouvoir, entre les mains des hommes, aussi bien sous la plume des plus lettrées, telle Émilie du Châtelet, qu’avec l’appui des écrivains qui débattent de la condition féminine et écrivent sur ce thème. Il est alors logique que, quand éclate la Révolution de 1789, les femmes y participent activement.

Quelques cahiers de doléances ont laissé la parole aux femmes, mais les revendications restent encore limitées, par exemple concernant les droits à payer par les veuves ou le traitement des filles-mères.

Jean-François Janinet, "Les dames de la Halle et autres Femmes, partant de Paris pour Versailles", XVIIIème siècle.  Gravure, BnF

Cependant, dès les premières journées révolutionnaires de 1789, elles sont présentes, comme Pauline Léon qui participe à la prise de la Bastille ; ce sont elles aussi qui, en octobre 1789, se rendent à Versailles et exigent, dans l’assemblée, le retour de la famille royale à Paris. Un autre geste marquant, pour soutenir les armées révolutionnaires en lutte, a été ce "don patriotique" qui a conduit plusieurs femmes riches à offrir leurs bijoux.

Cependant, elles trouvent difficilement une place active dans les assemblées qui légifèrent, où celles que l’on nomme péjorativement "les tricoteuses" sont cantonnées dans les tribunes, ce qui ne les empêche pas de manifester bruyamment.

Jean-François Janinet, "Les dames de la Halle et autres Femmes, partant de Paris pour Versailles", XVIIIème siècle.  (gauche), et « Les femmes de Versailles siégeant à l’Assemblée nationale au milieu des députés » (droite). Gravures, BnF

Jean-François Janinet, « Les femmes de Versailles siégeant à l’Assemblée nationale au milieu des députés ». Gravure, BnF

Les femmes fondent alors des clubs patriotiques, sur le modèle de ceux des hommes : elles y lisent et commentent les lois, rédigent des brochures réclamant des droits, qu’elles diffusent activement. Elles cherchent à se faire écouter des assemblées,  telle Pauline Léon qui, en mars 1792, lit une pétition en faveur du droit pour les femmes de former une garde nationale féminine ou, en juin 1793, prend la tête d’une délégation de femmes demandant à être admises à la Convention. Mais la constitution alors élaborée n’est soumise qu’au suffrage « universel »… masculin, et, le 30 octobre 1793, les clubs féminins sont interdits…

Chérieux, Club des femmes patriotes dans une église, 1793. Aquarelle, 40,8 x 54,5. BnF

Ainsi, très vite les femmes sont renvoyées à leur infériorité traditionnelle.

Chérieux, Club des femmes patriotes dans une église, 1793. Aquarelle, 40,8 x 54,5. BnF

Biographie d'Olympe de Gouges

 

C’est dans ce contexte historique que nous pouvons mesurer la place prise par Olympe de Gouges (1748-1793).

Anonyme, Olympe de Gouges, XVIII° s. Mine de plomb et aquarelle, 28 x 21,3. Musée du Louvre

Une femme libérée

Déclarée sous le nom de Marie Gouze, fille d’un maître-boucher, la rumeur, à Montauban où elle a passé sa jeunesse, la disait fille illégitime de son parrain, le marquis Lefranc de Pompignan, poète. Sa mère, fille d’un avocat, lui permit de recevoir une éducation assez soignée.

Son mariage, en 1765, à dix-sept ans, à un homme de trente ans de plus qu’elle, important client de la boucherie paternelle, a tout du mariage forcé, et quand, un an plus tard, après la naissance d’un fils, son mari meurt, elle affirme sa liberté en décidant de monter à Paris. Deuxième acte de liberté, elle ne garde pas le nom de son époux, usage pour une veuve, mais prend le nom d’Olympe de Gouges. Elle trouve un riche protecteur, avec lequel elle a une liaison jusqu’à la Révolution, ce qui lui permet de fréquenter les salons mondains, de mener une vie luxueuse, et elle se lance dans une carrière littéraire. Mais elle refuse le mariage car la loi interdit à une femme de publier sans le consentement de son époux.

Anonyme, Olympe de Gouges, XVIII° s. Mine de plomb et aquarelle, 28 x 21,3. Musée du Louvre

Une femme engagée

Elle s’intéresse d’abord au théâtre, allant jusqu’à monter une petite troupe – dans laquelle son fils est acteur – qui se produit à Paris et dans les environs. Ses premières pièces traduisent déjà son engagement, contre l’esclavage dans Zamore et Mirza ou l’Esclavage des Noirs (1784), une utopie humaniste qui lui vaut la menace d’une lettre de cachet pour l’envoyer à la Bastille, et ne sera jouée qu’en 1788,  Le Mariage inattendu de Chérubin (1786) et Le Couvent ou les vœux forcés (1790), en faveur de l’égalité des sexes et de la liberté des femmes.

Mais, très vite son engagement prend un tour plus politique, avec deux écrits, en 1788, Lettre au Peuple ou projet d’une caisse patriotique, par une citoyenne, et Remarques patriotiques par l’auteur de la Lettre au Peuple : elle y énonce un programme de réformes sociales. Pendant la révolution, son engagement se confirme par de nombreuses brochures adressées aux assemblées législatives, aux Clubs patriotiques, et, surtout, par sa Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne, en 1791. Mais, quand elle propose à la Convention de plaider, aux côtés de Malesherbes, pour la défense de Louis XVI qu’elle accuse en tant que roi mais pas en tant qu’homme, le rejet est catégorique : comment une femme pourrait-elle tenir ce rôle ?

C’est son opposition à la Terreur, dont elle dénonce les « criminelles extravagances » dans un manifeste Les Trois Urnes ou le Salut de la patrie, par un voyageur aérien, qu’elle affiche elle-même le 20 juillet 1793, ce qui lui vaut d’être arrêtée le jour même. Elle y propose trois choix politiques : une république une et indivisible, une république fédéraliste et, audace inacceptable, le retour à une monarchie constitutionnelle. Le 6 août le tribunal révolutionnaire l’inculpe, elle est emprisonnée, puis condamnée à la guillotine lors de son jugement le 2 novembre. Elle monte à l’échafaud dès le lendemain, deuxième femme à être exécutée après la reine.

Voici en quels termes celui qui est alors procureur de Paris, avant d’être lui-même guillotiné en 1794, Pierre-Gaspard Chaumette, commente son action face aux "républicaines" :

« [une] virago, la femme-homme, l’impudente Olympe de Gouges qui la première institua des sociétés de femmes, abandonna les soins de son ménage, voulut politiquer et commit des crimes… Tous ces êtres immoraux ont été anéantis sous le fer vengeur des lois. Et vous voudriez les imiter ? Non ! Vous sentirez que vous ne serez vraiment intéressantes et dignes d’estime que lorsque vous serez ce que la nature a voulu que vous fussiez. Nous voulons que les femmes soient respectées, c’est pourquoi nous les forcerons à se respecter elles-mêmes. »

Mettais, 1793, l’exécution d’Olympe de Gouges, lavis. British Museum

Mettais, 1793, L’exécution d’Olympe de Gouges, lavis. British Museum

Problématique

 

Cette observation du contexte de l’écriture de la Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne, explique le choix de la problématique adoptée pour l’étudier œuvre : Comment cette œuvre illustre-t-elle le combat en faveur des droits de la femme ?

Cette problématique va nous conduire à trois questionnements :

  • S’il y a « combat », cela implique l’existence d’adversaires, soutenant une thèse adverse : quels sont-ils ? quelle est cette thèse ? sur quels arguments repose-t-elle.

  • Ce combat vise un objectif : quels sont ces « droits de la femme » qu’il veut conquérir ? Sur quels domaines portent-ils ?

  • L’adverbe interrogatif « Comment » fait porter l’intérêt sur l’écriture même du texte : sa structure, sa tonalités, les procédés de style adoptés…

Présentation de l'œuvre 

Pour lire l'œuvre d'Olympe de Gouges

LE TITRE : un double modèle 

Le modèle anglais

 

L’expression « Déclaration des droits » est la traduction de l’anglais « Bill of rights ». C’est en 1689 qu’à la suite de la révolution qui renverse le roi catholique Jacques II au profit de sa nièce Marie Stuart, protestante, épouse du prince Guillaume d’Orange, ceux-ci s’engagent à défendre une « déclaration des droits » qui transforme la monarchie absolue en monarchie parlementaire. Son titre complet est significatif des nouveaux droits du peuple : « Acte déclarant les droits et les libertés du sujet et mettant en place la succession de la couronne ».

En France, de nombreux philosophes des Lumières ont loué la liberté d’expression ainsi de règle en Angleterre, comme Voltaire dans ses Lettres philosophiques (1764) :

Présentation

La nation anglaise est la seule de la terre qui soit parvenue à régler le pouvoir des rois en leur résistant, et qui, d’efforts en efforts, ait enfin établi ce gouvernement sage où le prince, tout puissant pour faire du bien, a les mains liées pour faire le mal, où les seigneurs sont grands sans insolence et sans vassaux et où le peuple partage le gouvernement sans confusion. La Chambre des Pairs et celle des Communes sont les arbitres de la nation, le Roi est le sur−arbitre […].

Lettres patentes de Louis XVI promulguant le texte de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen, l'abolition des privilèges féodaux, etc 1789

Le modèle français

 

C’est sur ce modèle que, quand la réunion des États généraux à Versailles se déclare Assemblée nationale le 17 juin 1789, avant d'abolir les trois ordres sociaux, puis de s’instituer Assemblée constituante, celle-ci déclare, le 4 août, que la Constitution sera précédée d’une « Déclaration des droits » pour en poser les principes fondamentaux. Le 5 octobre, Louis XVI est contraint d’accepter les dix-sept articles de cette Déclaration ainsi que les dix-neuf articles de la Constitution déjà rédigés, texte promulgué le 3 novembre par une « Lettre Patente ». 

C’est le modèle de cette Déclaration que suit Olympe de Gouges, qui exprime ainsi la volonté des femmes, dès les débuts de la Révolution, d’avoir des représentantes à l’Assemblée nationale.

Lettres patentes de Louis XVI promulguant le texte de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen, l'abolition des privilèges féodaux, etc 1789

C’est aussi ce que réclame le pamphlet de Madame de Cambis, dont le titre affirme sa protestation contre « Le sort actuel des femmes », volonté soutenue aussi par un article du philosophe Condorcet « Sur l’admission des femmes au droit de cité », publié le 3 juillet 1790. Mais, une semaine déjà après la prise de La Bastille, le député Sieyès, leur a dénié ce droit : « « Les femmes, du moins dans l’état actuel, les enfants, les étrangers, ceux encore qui ne contribueraient en rien à soutenir l’établissement public, ne doivent point influer activement sur la chose publique. » Il est donc affirmé tout à fait clairement que les femmes font partie des citoyens passifs, et ne peuvent donc voter au sein des assemblées. C'est bien là ce qui révolte Olympe de Gouges.

LA STRUCTURE 

Pour lire l'article de Condorcet

L’œuvre porte en son centre, comme son modèle, dix-sept articles, précédés d’une courte introduction, intitulée « Préambule », qui remplace le titre du modèle masculin, « Déclaration des droits de l’homme en société ».

Mais nous notons trois éléments particulièrement originaux :

  • une adresse « À la reine », en forme de dédicace où elle déclare vouloir ainsi lui « faire hommage de cette singulière production ».

  • sous le titre « Les droits de la femme », trois paragraphes interpellent violemment celui qui fait figure d’adversaire : « Homme, es-tu capable d’être juste ? »

  • un « Postambule », qui formule plus clairement un appel à la « Femme », soutenu par une argumentation personnelle et directe.

Olympe de Gouges, Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne

L’image saisissante qui conclut le « Postambule », « Le mariage est le tombeau de la confiance et de l'amour. », conduit à un ultime ajout intitulé "Forme du Contrat social de l’Homme et de la Femme", où Olympe de Gouges propose une nouvelle « formule » de rédaction de ce qu’elle nomme « l’acte conjugal ».

LECTURE CURSIVE : « À la reine » 

Pour lire la dédicace

L'objectif de la dédicace

 

Adresser une dédicace, au roi ou à tout noble protecteur, est un acte fréquent sous l’ancien régime, le plus souvent une façon pour un écrivain de plaider en faveur de son œuvre.

Mais le but d’Olympe de Gouges est, plus que de solliciter un appui personnel, d’amener à reine à user de son pouvoir pour se ranger aux côtés des femmes en lutte : « Il n’appartient qu’à celle que le hasard a élevée à une place éminente, de donner du poids à l’essor des Droits de la Femme, et d’en accélérer les succès. » Cet appel est insistant dans toute la seconde partie du texte, jusqu’aux injonctions finales : « Soutenez, Madame, une si belle cause ; défendez ce sexe malheureux, et vous aurez bientôt pour vous une moitié du royaume, et le tiers au moins de l’autre. / Voilà, Madame, voilà par quels exploits vous devez vous signaler et employer votre crédit. »

Un autoportrait

 

Cette dédicace nous offre aussi une image d’Olympe de Gouges, qui insiste sur sa liberté. Déjà elle marque sa différence avec les dédicataires ordinaires, « je n’emploierai point l’adulation des Courtisans pour vous faire hommage de cette singulière production » ; cependant elle conserve tout de même, dans ses formules finales, l’expression de son « plus profond respect » face à celle qui reste encore la souveraine, mais qu'elle appelle  « Madame », et non pas "Majesté".

D’ailleurs, de même qu’elle jugeait que Louis XVI roi était condamnable en tant que roi mais non en tant qu’homme, la considérant en tant que « mère et épouse », elle rappelle à la reine le soutien qu’elle-même a pu lui apporter : « Lorsque tout l’Empire vous accusait et vous rendait responsable de ses calamités, moi seule, dans un temps de trouble et d’orage, j’ai eu la force de prendre votre défense. »

Mais, parallèlement, elle affirme ses opinions en l’avertissant des risques courus si elle s’élevait contre le peuple : « L’intrigue, la cabale, les projets sanguinaires précipiteraient votre chute, si l’on pouvait vous soupçonner capable de semblables desseins. » 

Marie-Antoinette emprisonnée à la Conciergerie, 1793. Gravure

reine en prison.jpg

Son adhésion à la révolution, qui libère des « tyrans », et son patriotisme  ressortent par son enthousiasme à la fin de la dédicace : « Croyez-moi, Madame, notre vie est bien peu de chose, surtout pour une Reine, quand cette vie n’est pas embellie par l’amour des peuples, et par les charmes éternels de la bienfaisance. », « tout bon Citoyen sacrifie sa gloire, ses intérêts, quand il n’a pour objet que ceux de son pays. »

EXPLICATION N°1 : « Le préambule » et les articles 1 à 4 

LECTURE CURSIVE : « Les droits de la femme » 

Pour lire le texte de la lecture cursive

Ces trois paragraphes représentent une adresse directe à l’adversaire, interpellé et tutoyé comme en une sorte de revanche du sexe « opprim[é] : « Homme, es-tu capable d’être juste ? C’est une femme qui t’en fait la question ». Les questions brutales conduisent à une suite d’injonctions, qui introduisent l’argument principal, religieux : la création n’offre aucun exemple de cet « empire tyrannique » qu’exercent les hommes sur les femmes : « Partout tu les trouveras confondus, partout ils coopèrent avec un ensemble harmonieux à ce chef-d’œuvre immortel. »

L’énumération dans le dernier paragraphe, en dressant un portrait péjoratif de l’homme, soutient cette accusation : « Bizarre, aveugle, boursouflé de sciences et dégénéré, dans ce siècle de lumières et de sagacité, dans l’ignorance la plus crasse, il veut commander en despote ». Ainsi se justifie la revendication des femmes, « un sexe qui a reçu toutes les facultés intellectuelles ; il prétend jouir de la révolution, et réclamer ses droits à l’égalité ».

Préambule-TX1

Introduction de l'explication

 

Olympe de Gouges suit de très près son modèle, la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen. Mais une comparaison entre, dans les deux textes, ce qu’elle nomme « Préambule » qui l’introduit, et les quatre premiers articles conduisent à une question : se contente-t-elle de féminiser l’expression ?

Pour lire le texte de l'explication

La féminisation 

Olympe de Gouges, Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne, 1791pg

Olympe de Gouges, tout en reprenant le lexique et la syntaxe de la Déclaration de l’Assemblée, s’emploie à féminiser l’expression des droits de la façon la plus simple, par substitution : les « droits de la femme » remplacent les « droits de l’homme », les « réclamations des droits des citoyennes » remplacent celles des « citoyens ».

Mais elle procède aussi par ajout. Par exemple, là où le texte d’origine réclame « la conservation des droits naturels et imprescriptibles de l'Homme », avec la majuscule qui généralise à « l’être humain », elle précise expressément « de la femme et de l’homme ».

Enfin, au lieu des « Représentants du Peuple Français », l’énumération qui ouvre le « Préambule », détaillant « Les mères, les filles, les sœurs, représentantes de la Nation », traduit sa volonté de rappeler aux hommes la place si proche occupée par les femmes dans leur vie, donc les sentiments qu’ils devraient avoir envers elles ; de plus, l'emploi, au lieu de « Peuple », du terme « Nation », plus habituel en 1791, époque de l’écriture, les invite à tenir compte davantage des acquis de la Révolution, qui devraient les amener à accepter l’idée d’égalité.

L’engagement d’Olympe de Gouges 

Dans le "Préambule"

 

Le texte marque nettement la volonté polémique d’Olympe de Gouges, par la comparaison établie entre les deux sexes. Par exemple, la formulation, strictement politique, qui distingue « les actes du pouvoir législatif, et ceux du pouvoir exécutif » est remplacée par la seule distinction des sexes : « les actes du pouvoir des femmes et ceux du pouvoir des hommes ». Elle en arrive ainsi à un éloge insistant des femmes, puisqu’au lieu de « l’Assemblée Nationale », elle prend comme sujet de sa phrase de présentation « le sexe supérieur en beauté comme en courage dans les souffrances maternelles ».

Choix paradoxal cependant puisque ce comparatif, alors même qu’elle revendique l’égalité, repose sur l’image traditionnelle de la femme, sa double dimension de séductrice et de mère. De même, comment expliquer, à la fin du paragraphe, l’ajout « des bonnes mœurs » entre l’objectif initial de « maintien de la Constitution » et de « bonheur de tous » ? Faut-il y voir une volonté de répondre par avance à une objection de ceux qui considèrent que l’association des femmes à la vie publique risquerait de les conduire à l’immoralité ? À nouveau, cette précision ne révèle-t-elle pas qu’Olympe de Gouges reste marquée par le regard traditionnel porté sur les femmes, dont la moralité serait fragile ?

Dans les articles

 

L'article 1

La revendication d’égalité est immédiatement mise en valeur dans le premier article. Là où le texte initial regroupe « Les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droits », Olympe de Gouges, en distinguant les deux verbes, renforce les deux principes, en insistant sur celui d’égalité : « La femme naît libre et demeure égale à l’homme en droits. »

L'article 3

Il est intéressant par l’ajout de la définition de « la Nation » avec la négation restrictive qui vise à nouveau à exiger l’égalité : « qui n’est que la réunion de la femme et de l’homme ». C’est ce qui explique, vu que les femmes ne sont pas encore autorisées à participer aux institutions ni aux organismes officiels, qu’elle supprime ensuite le premier sujet « nul corps », pour garder seulement « nul individu ne peut exercer d’autorité qui n’en émane expressément. »

L'article 4

Davantage modifié, l’article 4 accentue la tonalité polémique. Il ne s’agit pas seulement, en effet, d’affirmer que « [l]a liberté consiste à pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas à autrui », mais à « rendre tout ce qui appartient à autrui », en ajoutant que c’est aussi une question de « justice » qui ne concerne plus uniquement « chaque homme », mais signifie que la femme a été privée injustement de son dû. L’accusation est soutenue par un lexique violent : « la tyrannie perpétuelle que l’homme lui oppose. » Enfin, la Déclaration de 1789 pose une limite à la liberté que « [c]es bornes ne peuvent être déterminées que par la Loi », avec une majuscule qui donne à ce terme son seul sens juridique. Au contraire, Olympe de Gouges retrouve les principes chers à la philosophie des Lumières en réclamant un changement en faveur des femmes : « ces bornes doivent être réformées par les lois de la nature et de la raison. »

CONCLUSION

 

Olympe de Gouges n’a pas attendu la Révolution pour demander plus de liberté pour les femmes, et pour proclamer leurs droits à être considérées comme les égales des hommes. Mais sa Déclaration apporte la preuve du bien-fondé de son engagement.

La marche sur Versailles, les 5 et 6 octobre 1789. Gravure, BnF

La marche sur Versailles, les 5 et 6 octobre 1789. Gravure, BnF

Même quand le pouvoir est placé entre les mains du peuple, et même quand les femmes ont lutté à leurs côtés pour établir la république, son texte montre que les hommes ne sont pas encore prêts à leur accorder une juste place dans la vie politique et dans la société.

ÉTUDE D’ENSEMBLE : les articles 

Pour lire les articles des deux Déclarations

La comparaison précédente, sur les quatre premiers articles, se poursuit, avec le même objectif : faire apparaître les apports personnels d’Olympe de Gouges par rapport au modèle qu’elle suit.

Articles

Autour de la « loi » : articles 5 à 9

 

Comme dans l’article 4, elle insiste, plus que sur la « loi » issue de l’Assemblée, qui, à ses yeux, n’est que celle des hommes, sur une conception plus large en reprenant « Les lois de la nature et de la raison », qu’elle qualifie par des adjectifs mélioratifs : « ces lois sages et divines ». De même, elle continue à féminiser son expression, en ajoutant systématiquement « les citoyennes » là où le texte initial ne mentionne que « les Citoyens » ou de remplacer le masculin par le féminin, comme dans l’article 8.

Mais nous observons plusieurs suppressions, qui posent question :

         Dans l’article 6, elle supprime la précision concernant la loi : « soit qu’elle protège, soit qu’elle punisse ». Peut-être l’a-t-elle jugée évidente, et considérait-elle qu’elle affaiblissait l’exigence, pour elle fondamentale : autoriser les femmes à participer au pouvoir législatif.

          Cette volonté d’aller à l’essentiel est encore plus flagrante dans l’article 7, l’idée étant nettement posée en tête : « Nulle femme n’est exceptée ». Sans entrer dans les détails, du côté de ceux qui « font exécuter des ordres arbitraires » ou, inversement, de ceux qui refusent d’ « obéir à l’instant », elle se contente, une fois de plus, d’affirmer l’égalité en refusant qu’un traitement spécifique, plus indulgent, soit réservé aux femmes : « les femmes obéissent comme les hommes à cette loi rigoureuse. »       

Jean-Jacques La Barbier, Représentation des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789, vers 1789. Huile sur panneau, 71 x 56. Musée Carnavalet

Jean-Jacques La Barbier, Représentation des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789, vers 1789. Huile sur panneau, 71 x 56. Musée Carnavalet

       La transformation la plus importante porte sur l’article 9, qui se retrouve presque inversé. La déclaration de 1789 met l’accent sur le refus de ce qui serait une « rigueur » excessive, qui « devrait être sévèrement réprimée par la loi. » Olympe de Gouges, au contraire, insiste sur la force de la sanction : « Toute femme étant déclarée coupable, toute rigueur est exercée par la loi. »

Autour de la liberté : articles 10 et 11

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Ces deux articles, sur la liberté, enrichissent la Déclaration de 1789, en précisant les revendications fondamentales aux yeux d’Olympe de Gouges.

       Dans l’article 10, en remplaçant, « ses opinions, même religieuses » par « ses opinions, même fondamentales », elle se donne la possibilité de répéter ce qui pour elle est un enjeu fondamental : « le droit de monter à la tribune ». En le justifiant par « le droit de monter sur l’échafaud », elle cherche à rétablir à nouveau une égalité de traitement, dans la mort comme dans la vie.

        L’article 11, sur la liberté « des pensées et des opinions » est particulièrement intéressant car elle la lie à la question de l’héritage, alors dénié à tout enfant non reconnu par le père, ce qu’elle qualifie violemment de « préjugé barbare ». Sans les nommer, elle rappelle ainsi à la fois la situation douloureuse des « filles-mères », socialement rejetées car seules à porter le blâme de leur grossesse, et elle rappelle aux hommes, en cas d’enfant né d’un adultère, le risque qui « force » l’épouse « à dissimuler la vérité ». C’est pourquoi, très habilement, elle justifie comme relevant de l’intérêt même des hommes le discours de la femme directement introduit : « je suis mère d’un enfant qui vous appartient ».

La notion d’« utilité publique » : articles 12 à 15

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L’article 12 est uniquement centré sur « la femme et la citoyenne », et peut-être est-ce la raison pour laquelle la nécessité d’une « force publique » pour garantir les droits, qui, dans le texte de 1789, fait référence à la police, la gendarmerie, voire l’armée, est remplacée par celle d’« utilité majeure »… La question est donc déviée : il faudra déterminer ce qu’est cette « utilité majeure […] instituée pour l’avantage de tous », et qui ne refonderait pas de nouveaux privilèges « pour l’utilité particulière de celles à qui elle est conférée. » C'est ce à quoi répondent les trois articles suivants.

Le bon fonctionnement d’une société implique notamment des services publics, donc une imposition, sujet de ces trois articles. Mais, là où le texte initial reste très général, en parlant de « contribution commune », la revendication d’Olympe de Gouges met en parallèle les charges féminines, « toutes les corvées », « toutes les tâches pénibles », et les droits que cela confère, avec une énumération qui détaille la place accrue qu’elle souhaite pour les femmes : « elle doit donc avoir de même part à la distribution des places, des emplois, des charges, des dignités et de l’industrie. » C’est sur cette même exigence qu’insiste l’article 14, en dépassant le cadre étroit de l’imposition pour réclamer « l’admission d’un partage égal, non seulement dans la fortune, mais encore dans l’Administration publique », ainsi que, dans l’article 15, le remplacement de « La Société » par « la masse des femmes, coalisée pour la contribution à celle des hommes ».

En guise de conclusion : articles 16 et 17

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Dans l’article 16, qui formule l’importance de la constitution, Olympe de Gouges répond par un rejet, très catégorique : « La constitution est nulle si la majorité des individus qui composent la Nation n’a pas coopéré à sa rédaction. » C'est son ultime réclamation en faveur de droits politiques.

Dans l’article 17, comment expliquer le passage chez Olympe de Gouges de la formule au singulier et négative, « La propriété étant un droit inviolable et sacré, nul ne peut en être privé », au pluriel, rendu insistant par la double affirmation, « à tous les sexes » et « pour chacun », et la précision « comme vrai patrimoine de la nature » ? Sans doute faut-il voir là un rappel de l’exclusion des femmes du droit de disposer librement de leur fortune, qu’il s’agisse de la dot, remise entre les mains du mari, de  son héritage, dont il peut disposer librement, et même de ses biens propres, tels ses bijoux, qu’il peut aliéner. Elle remplace alors le patriarcat, c’est-à-dire le pouvoir entre les mains des hommes, par un autre principe fondateur, « la nature », c'est-à-dire l’appartenance de tous, homme comme femme, à une même humanité. Elle va même plus loin, indirectement, car en ajoutant « tous les sexes réunis ou séparés », elle introduit, non seulement le droit au divorce, encore interdit, mais même l’idée que celui-ci ne doit pas se faire au détriment financier de la femme.

CONCLUSION

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Olympe de Gouges, engagée dès avant la révolution, comme dans sa Lettre au peuple, en faveur des droits des plus faibles, et tout particulièrement des femmes, ne peut qu’être indignée en constatant qu’après les avoir laissées débattre dans des clubs et se mêler de la vie politique, les révolutionnaires au pouvoir refusent aux femmes la citoyenneté qui leur accorderait une réelle égalité. C’est ce qui explique sa Déclaration qui met en parallèle les devoirs, les contraintes et les interdits imposés, de longue date, aux femmes, et le droit qu’elle revendique, droit à l’égalité qui serait leur rendre enfin justice.

Mais quel écho aura cette Déclaration ? Quelques droits sont accordés, par exemple, en 1791, celui de bénéficier d’une succession, celui de divorcer en 1792, ou la reconnaissance des enfants naturels, en 1793. Mais, peu à peu, ces quelques droits leur sont refusés, et, en 1795 la Convention leur interdit d’accéder à une tribune ou même d’assister à des assemblées politiques…

À son époque, cette Déclaration a peu retenu l'attention, et ce n’est pas ce qui lui a valu sa condamnation à mort. En fait, ce n’est que bien plus tard, dans la seconde moitié du XIXème siècle, que le féminisme d'Olympe de Gouges est reconnu, pour la façon dont elle se sert de son modèle pour donner plus de force à ses revendications.

Explication N°2 : « Le postambule », du début à ''… respectable et méprisé. " 

Pour lire l'extrait

Les articles, repris de la Déclaration de 1789 dans laquelle Olympe de Gouges fait œuvre polémique en introduisant ses propres analyses sur les droits à accorder aux femmes, sont précédés d’un « Préambule » où elle a violemment interpellé ses adversaires : « Homme, es-tu capable d’être juste ? ». Dans le « Postambule », c’est aux femmes qu’elle adresse un vibrant appel. Comment procède-t-elle pour les inciter à la conquête de leurs droits ?

Postambule-TX2

L'image de la femme sous l'Ancien Régime 

L’extrait oppose nettement deux époques, la première évoquant les temps révolutionnaires, la seconde l’époque de l’ancien régime, structure signalée par « Passons maintenant », à la ligne 22, mais à laquelle dès le début elle fait fréquemment allusion. Ces temps anciens, qui reposaient sur une image traditionnelle de la femme, sont marqués comme achevés par le passé composé « ce que vous avez été dans la société ».

Mais sont-ils vraiment révolus ? Telle est la question que pose Olympe de Gouges, quand elle décrit la contradiction entre faiblesse et force qui caractérise, selon elle, les femmes sous l’ancien régime.

La faiblesse de la femme

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Aux yeux des hommes la femme n’est que faiblesse, par « nature » d’abord : « femmes, qu’y a-t-il de commun entre vous et nous ? », voilà la question qui fonde son infériorité. Les « décrets de la nature » seraient donc la loi absolue, justifiant que « la force leur [ait] ravi » toute forme de pouvoir social.

À cet argument est venu s’ajouter le poids de la religion, à laquelle fait allusion l’ironique formule « le bon mot du Législateur des noces de Cana », très irrespectueuse puisqu’il s’agit du Christ lui-même. Celui-ci, à sa mère, Marie, qui lui avait signalé que les convives n’avaient « plus de vin », a, en effet, sèchement répondu : « Que me veux-tu, femme ? Mon heure n’est pas encore venue. » Et Marie s’était respectueusement inclinée. 

Aux yeux de l’auteur, cette réponse ne fait que reprendre le mépris attaché à la nature féminine depuis le péché d’Ève, et ne relève que de ce qu’elle résume par l’énumération péjorative, « préjugés, [...] fanatisme, [...] superstition et [...] mensonges », ou par la métaphore, « les nuages de la sottise ».

Ainsi Olympe de Gouges inverse la réponse à son interrogation oratoire initiale « qu’y a -t-il de commun entre vous et nous ? » : au « rien », réponse de la « morale » traditionnelle, fondée sur la religion, elle substitue le pronom « Tout » lancé énergiquement en tête de phrase.

Michel-Ange, Adam et Ève, la tentation et la chute du Paradis terrestre, 1508-1512. Fresque, Chapelle Sixtine du Vatican, Rome

Michel-Ange, Adam et Ève, la tentation et la chute du Paradis terrestre, 1508-1512. Fresque, Chapelle Sixtine du Vatican, Rome

Le pouvoir des femmes

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Mais, paradoxalement, cet état de faiblesse n’a pas empêché les femmes d’exercer un pouvoir, que signale le champ lexical qui parcourt le texte : « régné » (l. 9), « Votre empire » (l. 9), « tout leur était soumis » (l. 29, repris l. 34), « elles commandaient » (l. 29). Mais quelle valeur accorder à ce pouvoir ? 

Olympe de Gouges le critique sévèrement, d’abord parce qu’elles n’ont fait, en usant de leur séduction, que profiter de « la faiblesse des hommes », incapables de leur « résist[er] » et dépeints, de façon très péjorative, comme de « serviles adorateurs rampant à [leurs] pieds ». Leur pouvoir, qui ne pouvait pas s’exercer ouvertement, a dû prendre des formes détournées. Elles ont donc mis en oeuvre « toutes les ressources de leurs charmes », qui sont autant de défauts qu’Olympe de Gouges énumère : « la contrainte et la dissimulation », « la ruse », « leur indiscrétion », « la cupidité [...] et l’ambition ».  Ainsi, « dans les siècles de corruption », elles ont pu étendre leur influence qu’une hyperbole amplifie : « le plus irréprochable ne leur résistait pas ». Puis une longue énumération, « ambassade, commandement, ministère, présidence, pontificat, cardinalat, enfin tout ce qui caractérise la sottise des hommes, profane et sacré, tout a été soumis », nous rappelle leur rôle à la Cour et dans les milieux mondains, où elles ont pu infléchir la politique du « gouvernement français », jouer les espionnes (« le cabinet n’avait point de secret pour leur indiscrétion »), et nul n’y a échappé. Mais la formule « administration nocturne », puisqu’elle n’ont pas le droit d’exercer au grand jour des fonctions officielles, ramène en réalité ce pouvoir à une forme de prostitution, et les comparaisons en soulignent les effets négatifs : « Les femmes ont fait plus de mal que de bien », « Elles commandaient au crime comme à la vertu », et ne reculaient pas devant « Le poison, le fer »…

 

Ainsi les femmes ne sortent pas grandies de ce tour d’horizon qui affirme, soit leur faiblesse, soit une force, mais pernicieuse. C’est contre cette opinion si négative que s’élève Olympe de Gouges, pour les appeler à réagir.

L'appel à la révolte 

Un bilan critique de la Révolution

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Olympe de Gouges commence par tirer un bilan de la Révolution, très critique en soulignant une contradiction fondamentale entre les « principes » affichés par les révolutionnaires, et leur application concrète

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La marche des femmes sur Versailles, le 5 octobre 1789. Gravure anonyme

Des principes libérateurs

Dans les premiers temps de la Révolution, les femmes ont aidé à mettre en place ces principes – liberté, égalité, fraternité –, comme le traduit l’image : « L’homme esclave a multiplié ses forces, a eu besoin des tiennes pour briser ses fers ».

En théorie, la révolution s’est voulu libératrice, comme le montre l’énumération imagée : « Le puissante empire de la nature n’est plus environné de préjugés, de fanatisme, de superstition et de mensonges ». Une allégorie vient renforcer ce progrès : « Le flambeau de la vérité a dissipé les nuages de la sottise et de l’usurpation », image qui rappelle l'appellation même de « siècle des Lumières ». 

Des droits refusés

Mais, dans la réalité, quel résultat pour les femmes ? Les principes sont niés puisque règnent les « injustices des hommes », dont l’auteur affirme « la conviction ». L'homme est donc coupable d’« inconséquence », c’est-à-dire d’un manque de logique : « Devenu libre, il est devenu injuste envers sa compagne ». Elle interpelle d’ailleurs directement les femmes : « Quels sont les avantages que vous avez recueillis dans la révolution ? » Les réponses à cette interrogation oratoire sont négatives, d’abord dans une phrase nominale hyperbolique : « Un mépris plus marqué, un dédain plus signalé ». Cette idée est reprise à la fin de l’extrait, accentuée par le chiasme qui met en parallèle les temps anciens et les temps nouveaux : « ce sexe autrefois méprisable et respecté, et depuis la révolution, respectable et méprisé ». L’opposition entre les adjectifs, « méprisable », « respectable », qui signalent une potentialité, et les participes passés, « respecté » et « méprisé », constat d'un fait réalisé, fait pleinement ressortir le fait que les femmes n’ont gagné, par la révolution, qu’une égalité trop théorique, qui ne s’inscrit pas dans les faits.

L'appel à la révolte

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Dans ces conditions, Olympe de Gouges ne peut qu’appeler les femmes à reprendre la lutte. Le ton de ce postambule est, en effet, injonctif, déjà à travers l’interpellation initiale de la destinatrice, d’abord au singulier et familièrement avec le tutoiement : « Femme, réveille-toi ». Mais très vite l’appel s’élargit, avec le pluriel, et devient enflammé : « Ô femmes, femmes… » Ajoutons à cela le rôle de l’impératif, qui parcourt le texte : « réveille-toi », « reconnais tes droits », « opposez courageusement », « réunissez-vous », « déployez toute l’énergie de votre caractère ». L’appel gagne donc en énergie, et, dès le début, nous comprenons qu’il s’agit d’une véritable guerre à mener, dont sonne l’alarme : « le tocsin de la raison sonne dans tout l’univers ».

Les armes du combat

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La raison

Pour mener cette guerre, une arme s’impose en cette fin de « siècle des Lumières », « la force de la raison », principe qui a guidé toute la réflexion des philosophes de cette époque. Ainsi le signe de ralliement de ces femmes-soldats sera bien « les étendards de la philosophie ». La raison doit donc à la fois guider la lutte, et soutenir la réflexion pour que les femmes sortent de leur passivité, de leur acceptation résignée, image d’un sommeil avec « réveille-toi ». Et la notion de lumières s’affirme dans l’interrogation oratoire, « quand cesserez-vous d’être aveugles ? »

Il s’agit bien d’inciter les femmes à sortir des ténèbres dans lesquelles elles sont encore enfermées

L'éducation

Pour y parvenir, un seul moyen, l’éducation, droit revendiqué à la fin du premier paragraphe : « puisqu’il est question, en ce moment, d’une éducation nationale, voyons si nos sages Législateurs penseront sainement sur l’éducation des femmes ». Que les femmes ne soient pas renvoyées à l’apprentissage des tâches ménagères, au seul enseignement d’une morale religieuse que leur ont donné, pendant longtemps, les couvents, voilà ce qu’implique l’adverbe « sainement » ici choisi. On notera pourtant qu’Olympe de Gouges ne balaie que la « superstition », un mauvais usage de la religion, mais conserve l’idée d’un « Être suprême », chère aux révolutionnaires, assimilé à la « nature », dont les « sages décrets » ont proclamé l’égalité entre les sexes.

La Fête de l’Être Suprême au Champs-de-Mars, en 1794. Gravure anonyme

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La promesse de victoire

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Certes, cette lutte n’est pas présentée comme facile, et Olympes de Gouges envisage qu’elle puisse effrayer les femmes, en prévoyant leurs objections : « qu’auriez-vous à redouter ? », « Craignez-vous… » Cependant, elle refuse d’envisager l’échec, en construisant un raisonnement par hypothèse, « S’ils s’obstinaient », c’est-à-dire si les hommes persistaient à leur refuser ces droits légitimes. La réponse à cette hypothèse, au lieu d’être, selon la règle de la concordance des temps, au conditionnel, est posée au futur, pour formuler la certitude de la victoire, et introduite par la conjonction « et » qui prend ici valeur de conséquence inéluctable : « et vous verrez bientôt… » Cette même certitude est répétée au moyen d’une négation restrictive, qui semble rendre la lutte plus facile : « Quelles que soient les barrières que l’on vous oppose, vous n’avez qu’à la vouloir ». 
Cette victoire ne consistera, en fait, qu’à appliquer les principes mêmes de la révolution, déjà inscrits dans la Déclaration des droits de l’homme, qu'elle applique aux femmes : la liberté, avec l’encouragement « déployez toute l’énergie de votre caractère », l’égalité pour « la réclamation de votre patrimoine, fondée sur les sages décrets de la nature », et la fraternité, image d’une harmonie rétablie entre les femmes et les hommes « fiers de partager avec [elles] les trésors de l’Être Suprême ».

Une allégorie révolutionnaire : l'égalité. Timbre commémoratif, 1989 

CONCLUSION

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Cet extrait développe un triple blâme.

  • D’abord, il vise les pouvoirs de l’Ancien Régime, notamment la religion, qui se sont employés à maintenir les femmes dans la soumission.

  • Puis, les révolutionnaires sont accusés d’avoir trahi les idéaux mêmes pour lesquels ils se sont battus.

  • Enfin, les femmes elles-mêmes n’échappent pas à la critique, coupables de s’être laissées enfermer dans leur image d’infériorité, d’en avoir joué sous l’ancien régime, et d’avoir peur aujourd’hui de revendiquer des droits pourtant légitimes.

Une allégorie révolutionnaire : l'égalité. Timbre commémoratif, 1989 

Ce texte offre aussi un parfait exemple de l’art d’argumenter. Il associe en effet le fait de convaincre et celui de persuader. D’un côté, Olympe de Gouges construit un raisonnement solide, faisant appel à la « raison », terme-clé de ce siècle des Lumières. Parallèlement, elle élabore un texte injonctif, fortement modalisé par tous les procédés d’écriture propre à inciter les femmes à ne plus accepter le sort que les hommes continuent à vouloir leur réserver.

Rappelons que les choix politiques de cette femme, engagée, l’ont conduite à mourir sur la guillotine…

Explication N°3 : « Le postambule », de "Sous l'ancien régime..." à "... l'administration publique." 

Un des premiers engagements d’Olympe de Gouges a été en faveur de la condition des noirs esclaves dans les colonies. Elle s’inscrit ainsi dans un combat entrepris par les philosophes des Lumières, depuis Voltaire dans ses contes philosophiques, Histoire de Voyages de Scarmentado écrite par lui-même (1756), ou Candide (1759) jusqu’à Condorcet, avec Réflexions sur l’esclavage des nègres, en 1781, en passant par l’abbé Raynal dans Histoire des deux Indes, en 1770. Elle a elle-même en  1784, fait la lecture à la Comédie-Française d’un drame en trois actes, Zamore et Mirza ou l’Heureux Naufrage, qui ne pourra être joué que remanié, en 1788, année où elle adhère à la Société des Amis des Noirs, fondée par Brissot, pour réclamer l’abolition de l’esclavage.

Médaillon abolitionniste, 1789. Porcelaine tendre, Manufacture royale de Sèvres 

Pour lire l'extrait

Médaillon abolitionniste, 1789. Porcelaine tendre, Manufacture royale de Sèvres 

Postambule-TX3

Or, après la dédicace « À la Reine », le « Préambule » et les dix-sept articles de sa Déclaration, le « Postambule » lance un vibrant appel pour que les femmes revendiquent leurs droits, suivi d’un rappel de leur situation sous la monarchie absolue. Quels changements cet extrait propose-t-il à travers la dénonciation formulée ?

1ère PARTIE : la femme sous la monarchie absolue (lignes 1 à 11)

Une introduction critique

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Le passage s’ouvre sur une dénonciation accentuée par le parallélisme syntaxique qui généralise et le lexique péjoratif, « Sous l’ancien régime, tout était vicieux, tout était coupable », le terme « vices » étant repris dans la question oratoire. Or cette question, introduite par le connecteur d’opposition, « mais », introduit un paradoxe, puisque le conditionnel, « ne pourrait-on pas apercevoir l’amélioration des choses », pose l’idée d’un changement possible « dans la substance même des vices », c'est à dire en comprenant mieux quels ils sont et comment ils se sont développés dans la société. 

Miguel-Angelo Lupi, Galanterie dans un salon au XVIIIème siècle, XIXème siècle. Huile sur toile, 45 x 33. Coll. privée

La condition féminine

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Nous retrouvons, dans la description de la condition féminine, l’image traditionnelle de la femme séductrice, tirant de là son pouvoir, ce que souligne la négation restrictive : « Une femme n’avait besoin que d’être belle ou aimable ». Ce pouvoir est immédiatement associé à l’argent, dont elle accentue le rôle, à travers les deux cas envisagés :

  • Le premier, « quand elle possédait ces deux avantages, elle voyait cent fortunes à ses pieds », transforme la femme en une sorte de prostituée, que se disputent les séducteurs ;

  • Le second, inversement, sous forme d’hypothèse, montre la rareté de celles qui ne cherchent pas à tirer un avantage de la séduction : « Si elle n’en profitait pas, elle avait un caractère bizarre, ou une philosophie peu commune qui la portait aux mépris des richesses ». Non seulement cette attitude semble incompréhensible, mais même elle se retourne contre celle qui refuse, alors blâmée au lieu d’être considérée comme vertueuse : « alors elle n’était plus considérée que comme une mauvaise tête. »

Miguel-Angelo Lupi, Galanterie dans un salon au XVIIIème siècle, XIXème siècle. Huile sur toile, 45 x 33. Coll. privée

Le rôle de l’argent est ainsi mis en valeur par le champ lexical, « l’or », les termes « commerce » et « industrie » pour évoquer la fréquentation des femmes, ou même « crédit », qui sous-entend que, comme dans la finance, c’est l’argent qui ouvre à la femme un pouvoir d’action. Selon Olympe de Gouges, les valeurs étaient donc inversées, puisque la morale n’a plus d’importance : « La plus indécente se faisait respecter » par la seule fortune que lui valaient ses charmes.

La volonté de changement

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Mais l’opposition temporelle entre l’imparfait, utilisé pour dépeindre la situation sous « l’ancien régime », et le futur, affirmation catégorique, marque nettement l’objectif d’Olympe de Gouges : détruire ce rôle de l’argent, « qui désormais n’aura plus de crédit ». Le premier acquis de la révolution a, en effet, été l’abolition des privilèges : il n’y a plus de « première classe », celle des privilégiés, les citoyens étant égaux en droits. C’est ce qui lui permet de formuler, par l’irréel du passé, un espoir que la fin de ce matérialisme triomphant marquera, parallèlement, la fin des « vices » : « S’il en avait encore, la révolution serait perdue, et sous de nouveaux rapports, nous serions toujours corrompus. » Elle exprime donc sa confiance en un progrès apporté par la révolution.

2ème PARTIE : la femme encore esclave (des lignes 11 à 18) 

La comparaison

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Dans son argumentation, Olympe de Gouges reste lucide sur la situation présente, et une nouvelle question oratoire introduit l’objection qui pourrait contredire son optimisme : « Cependant la raison peut-elle se dissimuler que tout autre chemin à la fortune soit fermé à la femme que l’homme achète comme l’esclave sur les côtes d’Afrique ? » Son indignation ressort de la comparaison, qui dévalorise totalement l’image de la femme. Certes, elle nuance cette comparaison en rappelant le pouvoir que sa séduction lui offre sur son séducteur : « La différence est grande, on le sait. L’esclave commande au maître ». Mais le maître n’en reste pas moins tout puissant, d’où les deux hypothèses formulées : il peut « lui donner sa liberté sans récompense », c’est-à-dire profiter de ses charmes, puis la rejeter quand il s’est lassé d’elle ; de plus, la séduction est éphémère, car arrive « un âge où l’esclave a perdu tous ses charmes ». 

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Abraham Bosse, Le mari battant sa femme, vers 1633. Eau-forte, 212 x 303. BnF

La femme séduite puis abandonnée reste alors sans ressources, d’où la question qui dramatise sa situation : « que devient cette infortunée ? »

Une société corrompue

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La réponse est terrible, car elle révèle à quel point la société est corrompue, malgré la Révolution, puisque l’image fait de la pauvreté elle-même le signe du rejet moral : elle est « [l]e jouet du mépris », et « les portes même de la bienfaisance lui sont fermées. » Elle ne recevra aucune aide, blâmée non pas pour son immoralité, mais pour ne pas avoir su en tirer profit. Le discours rapporté directement met en évidence cette inversion des valeurs, qui retourne le blâme contre la femme : « Elle est pauvre et vieille, dit-on, pourquoi n’a-t-elle pas su faire fortune ? » 

3ème PARTIE : le malheur des femmes (des lignes 18 à 25)

Pour soutenir son triste tableau de la condition de la femme puisque tout dépend encore de son pouvoir de séduction, Olympe de Gouges multiplie des exemples, de façon à associer l’émotion, la tonalité pathétique, pour persuader, à la « raison » mise en œuvre pour convaincre. Tous font de la femme la victime de l’homme :

  • Il profite de la naïveté d’« une jeune personne sans expérience », qui éprouve un sentiment sincère : elle lui offre sa vie par amour, et perd sa seule protection : « elle abandonnera ses parents pour le suivre ». Mais lui ne fait pas preuve du même amour, et le lexique péjoratif montre son absence de scrupules : « l’ingrat la laissera après quelques années, et plus elle aura vieilli avec lui, plus son inconstance sera inhumaine ».

  • Aucune loi n’oblige  encore l’homme à reconnaître des enfants illégitimes, ni à assurer une pension à leur mère : « si elle a des enfants, il l’abandonnera de même. S’il est riche, il se croira dispensé de partager sa fortune avec ses nobles victimes. »

  • Même quand son séducteur est libre et qu’un « engagement » a été officiellement signé, la loi protège toujours systématiquement l’homme : « Si quelque engagement le lie à ses devoirs, il en violera la puissance en espérant tout des lois. » Dans le cas où il s’agit d’un adultère, la maîtresse a encore moins de recours possible : « S’il est marié, tout autre engagement perd ses droits. »

4ème PARTIE : la solution souhaitée (de la ligne 25 à la fin) 

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Pour illustrer  laloi sur le divorce du 20 septembre 1792. Estampe

Le passage se conclut sur une dernière question oratoire, qui fait écho à l’espoir du début, que la révolution s'emploie à améliorer le sort des femmes, avec la reprise de la dénonciation morale : « Quelles lois reste-t-il donc à faire pour extirper le vice jusque dans la racine ? » Cette image agricole souligne à quel point un effort sera nécessaire, tant cette situation a perduré en étant considérée comme normale. La réponse est double, et renvoie aux articles mêmes de la Déclaration précédemment formulés : « Celle du partage des fortunes entre les hommes et les femmes, et de l’administration publique. » Rappelons que la femme, considérée comme mineure, est dépendante financièrement de l’homme qui dispose librement de ses biens, y compris de sa dot ou de ses bijoux, n’a nulle obligation en cas de divorce, et nul moyen d’exercer une fonction justement rémunérée. Olympe de Gouges avait déjà mis en avant, en effet, l’importance d’accorder à la femme de justes ressources :

Article XIII.

Pour l’entretien de la force publique, pour les dépenses d’administration, les contributions de la femme et de l’homme sont égales ; elle a part à toutes les corvées, à toutes les tâches pénibles ; elle doit donc avoir de même part à la distribution des places, des emplois, des charges, des dignités et de l’industrie.

Article XIV.

Les Citoyennes et Citoyens ont le droit de constater par eux-mêmes ou par leurs représentants, la nécessité de la contribution publique. Les Citoyennes ne peuvent y adhérer que par l’admission d’un partage égal, non seulement dans la fortune, mais encore dans l’administration publique, et de déterminer la quotité, l’assiette, le recouvrement et la durée de l’impôt.

CONCLUSION

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Tout ce passage repose sur la vision traditionnelle de la femme, séductrice dangereuse, mais ici inversée car le participe passé « séduite » la présente comme une victime. Or, étymologiquement, le verbe « séduire, du latin « seducere », s’associe à l’immoralité : la femme séduite est conduite en dehors du droit chemin, du chemin de la vertu, pour tomber dans le « vice ». Mais qui est responsable ? Ce que déplore Olympe de Gouges est que le blâme retombe sur la femme alors que c’est l’homme qu’elle juge coupable, et une société patriarcale qui lui accorde tous les droits.

Ainsi, cette fin du « Postambule », en jetant un regard rétrospectif sur la condition féminine sous la monarchie absolue, mais que la Révolution n'a pas améliorée, offre un triple intérêt par rapport à la rédaction  juridique, plus froide, plus neutre, des articles :

  • Elle dramatise la situation de la femme, qui n’a pour arme que la séduction, arme éphémère et qui ne lui offre aucune garantie. Au-delà de l’argumentation, rationnelle, elle cherche donc à émouvoir ses lecteurs par la tonalité pathétique de ses tristes portraits.

  • En assimilant la situation des femmes à un « esclavage », elle fait écho aux luttes déjà entreprises pour abolir l’esclavage dans les colonies, en en faisant une cause, non seulement juridique mais morale : le droit à la dignité de tout être humain.

  • Elle y révèle sa foi en la Révolution, et dans le pouvoir du législateur de changer la société et les mœurs en changeant les lois pour établir une véritable égalité entre hommes et femmes.

LECTURES CURSIVES : autour de l'esclavage 

Pour lire le texte 1

Esclavage

La lettre de rentrée, adressée le 13 septembre 2021 par les IPR de l’académie de Nice aux professeurs de français, a apporté une précision sur le programme de l’EAF à propos d’Olympe de Gouges. Sa présentation limite l’étude de l’œuvre au passage allant de « Femme, réveille-toi… » à « … embrasse l’ordre social. 14 septembre 1791 ». La suite du texte, intitulé « Formes du contrat social de l’homme et de la femme » se trouve, de ce fait, exclue.

Or, l’élaboration initiale du site en avait proposé l’explication d’un passage, que nous avions ensuite retirée, pour en rester aux limites du programme officiel. Mais, les IPR écrivent que cette partie peut « à bon droit faire l’objet d’une étude et servir de support aux explications » et que les professeurs « gagneraient à intégrer ces pages à leur étude d’ensemble ». Nous rétablissons donc l’analyse précédemment proposée.

Texte 1 : Olympe de Gouges, Réflexions sur les hommes nègres, 1788, extrait

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Ce texte d’Olympe de Gouges paraît, en guise de Préface, lorsqu’est jouée, en 1788, sa pièce, Zamore et Mirza ou L’heureux naufrage, écrite en 1784 qui met en scène, à travers les péripéties vécues par les deux héros, une violente dénonciation du « déplorable sort » des esclaves dans les colonies.

Une femme engagée

Ce texte, fortement modalisé par les exclamations, les interrogations rhétoriques et le lexique péjoratif,  reprend la peinture de « l’effroyable sort » des esclaves, et nous y mesurons toute son indignation : « Le père a méconnu son enfant, le fils a sacrifié son père, les frères se sont combattus, et les vaincus ont été vendus comme des bœufs au marché. Que dis-je ? c’est devenu un Commerce dans les quatre parties du monde. / Un commerce d’hommes !… grand Dieu ! » 

Zamore-Mirza-couv.jpg

Les deux paragraphes qui l’introduisent la représentent d’ailleurs comme une femme sensible, dès la plus tendre enfance, mais aussi comme une patriote soucieuse de l’image de la monarchie : « Les Rois justes ne veulent point d’Esclaves ; ils savent qu’ils ont des Sujets soumis, et la France n’abandonnera pas des malheureux qui souffrent mille trépas ».

L'esclavage : une menace 

Dans un premier temps, elle critique « le préjugé » raciste, que la religion fondait sur la « malédiction de Cham » à devenir esclave de ses frères, pour justifier l’esclavage des hommes noirs. Par ses questions rhétoriques, elle s’emploie à détruire cette différence fondée sur « la couleur », et retourne contre les esclavagistes, les critiques lancées contre « l’Ottoman » par les Européens, qui, pourtant, se comportent de la même façon.

Son réquisitoire met en valeur les deux mêmes arguments que ceux du "Postambule" : « la Nature n’y avait aucune part, et que l’injuste et puissant intérêt des Blancs avait tout fait. », « Les Européens avides de sang et de ce métal que la cupidité a nommé de l’or, ont fait changer la Nature dans ces climats heureux ».

Nous notons aussi la même habileté, puisque, même si elle proteste « Je n’entends rien à la politique », c’est un argument politique qu’elle invoque en faveur de la liberté, en montrant qu’elle assurerait l’intérêt même des Européens et des colons en supprimant les menaces de révoltes sanglantes : « le droit de se lever comme les autres hommes les rendra plus sages et plus humains. Il n’y aura plus à craindre de conspirations funestes ».

Pour conclure 

Malgré cette vibrante Préface, la pièce d’Olympe de Gouges ne fut jouée que trois fois, et déchaîna, en décembre 1789, une violente cabale,  et sa reprise en 1792 provoqua une Lettre à Madame de Gouges, protestation des riches spectateurs qui tiraient profit du commerce triangulaire. Sa réponse, dans une Lettre aux représentants, révèle la force de son engagement : « « Quoi ! La cabale de quelques colons et la tyrannie histrionique l’emporteront sur l’intérêt public, sur la plus lumineuse équité, et l’an premier de la Liberté se souillera d’une injustice que n’eussent produite ni l’ignorance ni la barbarie du régime féodal ? »

Texte 2 : Olympe de Gouges, Réflexions sur les hommes nègres, 1788, de "J'offre un moyen invincible..." à "... un bon ménage."

Pour lire le texte 2

La révolution ne met pas fin à l’engagement d’Olympe de Gouges en faveur de la condition des noirs dans les colonies. Ainsi, à la fin de sa Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne, le « Postambule », qui propose une évolution du contrat de mariage, intitulée Formes du Contrat social de l’Homme et de la Femme, l’amène à élargir sa réflexion par une comparaison de la situation des femmes à celle des esclaves. Cette suite de son argumentation en dit long  sur l’image qu’elle se fait des femmes et sur sa volonté de défendre la cause de tous les opprimés.

1ère PARTIE : en guise de conclusion (des lignes 1 à 6) 

Après avoir incité les femmes à la lutte, Olympe de Gouges affirme avec force sa thèse en faveur de l’égalité : « J’offre un moyen invincible pour élever l’âme des femmes ; c’est de les joindre à tous les exercices de l’homme ». En envisageant cette participation conjointe des deux sexes au fonctionnement de la société, elle ne se fait cependant aucune illusion sur les obstacles, d’où son hypothèse, « si l’homme s’obstine à trouver ce moyen impraticable », qu’elle résout par une injonction : « qu’il partage avec la femme, non à son caprice, mais par la sagesse des lois. » Seul le législateur a donc le pouvoir de rétablir ce qu’elle considère comme un droit naturel, et les verbes au présent soulignent le résultat, une certitude que cette évolution ne peut être que bénéfique : « Le préjugé tombe, les mœurs s’épurent, et la nature reprend tous ses droits. » Elle va même plus loin en appliquant cette volonté de partage à la religion : « Ajoutez-y le mariage des prêtres ».

Très habilement, elle insiste sur l’utilité d’une telle égalité, qui rétablirait l’’ordre en ces temps troublés des débuts de la Révolution : « le Roi, raffermi sur son trône, et le gouvernement français ne saurait plus périr. » Notons qu’en 1791, cette révolutionnaire, qui a déjà adressé sa déclaration « à la Reine », ne réclame pas la mort du roi. Au contraire, consciente des menaces que les monarchies étrangères font peser sur le pays, elle juge, comme la plupart des philosophes des Lumières, qu’une monarchie constitutionnelle, accordant un réel pouvoir au Parlement, serait le meilleur et le plus sûr gouvernement.

2ème PARTIE : la critique de l’esclavage (des lignes 7 à 23) 

L'image du colonialisme

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Sa formule qui introduit le sujet, « Il était bien nécessaire que je dise quelques mots sur les troubles que cause, dit-on, le décret en faveur des hommes de couleur », est intéressante car elle lie ses revendications d’égalité entre femmes et hommes à une même réalité, celle de l’esclavage « dans nos îles ».

En désignant les partisans de l’esclavage comme « les Colons », Olympe de Gouges souligne l’influence qu’ils ont pu exercer sur l’Assemblée Constituante. L’article Ier de La Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 a supprimé de fait l’esclavage en proclamant la liberté et l’égalité de droits de « tout homme ». Mais les propriétaires dans les colonies ne l’entendent pas ainsi, et ils ont, pour des raisons économiques, leurs soutiens dans la vie politique française : « Il n’est pas difficile de deviner les instigateurs de ces fermentations incendiaires : il y en a dans le sein même de l’Assemblée Nationale : ils allument en Europe le feu qui doit embraser l’Amérique. »

Marcel Pierre Martinet, « Incendie de la plaine du Cap, massacre de Blancs », une révolte à Saint-Domingue. Gravure, vers 1833

Cette métaphore de l’incendie fait allusion à la situation historique qui a suivi le refus d’accorder des droits aux esclaves, un double massacre à Saint-Domingue. Trois cent cinquante mulâtres mènent une révolte dans la nuit du 28 au 29 octobre 1790, réprimée dans le sang par l’armée et la Garde Nationale. Cela oblige la Constituante à se prononcer plus clairement sur les droits politiques des noirs, ne les accordant finalement qu'à ceux nés de père et mère libres… à peine 5% d’entre eux. Ainsi ce qui est considéré alors comme un « décret en faveur des hommes de couleur » ne peut satisfaire ni les noirs des colonies, ni les propriétaires puisque cela contrevient déjà à leurs privilèges de blancs. Les troubles sont incessants, et s’étendent en Martinique, à La Réunion... 

Marcel Pierre Martinet, « Incendie de la plaine du Cap, massacre de Blancs », une révolte à Saint-Domingue. Gravure, vers 1833

Le blâme des colons

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Ils sont violemment dénoncés, à la fois par le verbe, qui détruit par avance leurs protestations, et par le lexique, qui fait écho à la dénonciation par les révolutionnaires de la monarchie absolue : « Les Colons prétendent régner en despotes sur des hommes ». Olympe de Gouges les dépeint comme des barbares, les qualifiant d’« inhumains », et elle souligne leur injustice par le discours direct qu’elle leur prête : « notre sang circule dans leurs veines, mais nous le répandrons tout, s’il le faut, pour assouvir notre cupidité, ou notre aveugle ambition. » Discours fictif, bien évidemment, puisqu’ils reconnaîtraient ainsi leur culpabilité, blâmant eux-mêmes, par ce lexique péjoratif, leur inhumanité et leurs massacres.   

L'argumentation d'Olympe de Gouges

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Une fraternité naturelle

Le premier argument pour défendre l’égalité entre noirs et blancs est le même que celui posé pour défendre les droits des femmes, l’idée que tous les êtres ont une même « nature », d’où son accusation : « méconnaissant les droits de la nature, ils en poursuivent la source jusque dans la plus petite teinte de leur sang. » La triple anaphore, signe de l’indignation d’Olympe de Gouges, s’ouvre sur une personnification, et est un plaidoyer au nom de la fraternité : « C’est là où la nature frémit d’horreur ; c’est là où la raison et l’humanité, n’ont pas encore touché les âmes endurcies ; c’est là surtout où la division et la discorde agitent leurs habitants. »

C’est pourquoi elle choisit le champ lexical de la famille, « des hommes dont ils sont les pères et les frères », « le père méconnaît le fils ; sourd aux liens du sang », en s’indignant : « il en étouffe tous les charmes ». Leur comportement, qui nie cette « nature » commune à tous les êtres créés est, pour elle, d’autant plus inadmissible qu’il a lieu dans « ces lieux les plus près de la nature », les terres coloniales encore éloignées du développement urbain de la métropole.

L’esclavage : une menace

Son second argument est introduit par une question rhétorique qui fait appel à la raison de ses destinataires par une allusion directe à la révolte de Saint-Domingue : « que peut-on espérer de la résistance qu’on lui oppose ? » L’alternative qu’elle pose est habile, car elle met en avant l’intérêt ultime des blancs : « la contraindre avec violence, c’est la rendre terrible, la laisser encore dans les fers, c’est acheminer toutes les calamités vers l’Amérique. » Maintenir à tout prix l’esclavage entraîne donc un double risque, « terrible », car il ne peut qu’entraîner le massacre des colons eux-mêmes, par vengeance, ou bien déchaîner, sur ces terres lointaines, « toutes les calamités » que la révolution a voulu faire cesser en France, mais qu’elle juge alors inévitables : « ils allument en Europe le feu qui doit embraser l’Amérique ».

2ème PARTIE : l'éloge de la loi (de la ligne 23 à la fin) 

Les principes revendiqués

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Elle mentionne d’abord le premier droit de l’homme, « Une main divine semble répandre par tout l’apanage de l’homme, la liberté », dont elle fait un privilège absolu, relevant de « l’Être suprême » créateur. Posé dans le premier article de la Déclaration de 1789, il prend donc force de loi, ce qui explique son contrepoint dans l’article 4 : « La liberté consiste à faire tout ce qui ne nuit pas à autrui : ainsi, l’exercice des droits naturels de chaque homme n’a de bornes que celles qui assurent aux autres Membres de la Société la jouissance de ces mêmes droits. »

Jean-Baptiste Lesueur, Plantation d’un arbre de la liberté, 1790-1791. Gouache sur carton, 36 x 53,5. Musée Carnavalet, Paris

Jean-Baptiste Lesueur, Plantation d’un arbre de la liberté, 1790-1791. Gouache sur carton, 36 x 53,5. Musée Carnavalet, Paris

C’est ce qui explique l’insistance d’Olympe de Gouges sur le deuxième principe révolutionnaire, l’égalité : « la loi seule a le droit de réprimer cette liberté, si elle dégénère en licence ; mais elle doit être égale pour tous, c’est elle surtout qui doit renfermer l’Assemblée Nationale dans son décret, dicté par la prudence et par la justice. » 

Son souhait, exclamation renforcée, élargit ensuite le rôle de la loi à la situation en France à l’époque de l’écriture : « Puisse-t-elle agir de même pour l’état de la France, et se rendre aussi attentive sur les nouveaux abus, comme elle l’a été sur les anciens qui deviennent chaque jour plus effroyables ! » Elle invite ainsi les législateurs à une vigilance accrue car les résistances à la révolution persistent, avec de nombreux troubles en province.

L'équilibre des pouvoirs

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Elle pose enfin une volonté, qui peut sembler audacieuse alors même que la fuite de la famille royale a été arrêtée à Varennes, ce qui installe l’idée que seule une république peut pérenniser la révolution. Or, pour sa part, elle réclame une monarchie constitutionnelle : « Mon opinion serait encore de raccommoder le pouvoir exécutif avec le pouvoir législatif, car il me semble que l’un est tout, et que l’autre n’est rien ; d’où naîtra, malheureusement peut-être, la perte de l’Empire Français. » Elle prévoit, en fait, le risque d’une abolition de la monarchie, une guerre des monarchies extérieures coalisées contre la France. Mais cet ultime souhait d’équilibre des pouvoirs, revient, en boucle, sur le sujet même de sa Déclaration, l’égalité entre femmes et hommes : « Je considère ces deux pouvoirs, comme l’homme et la femme qui doivent être unis, mais égaux en force et en vertu, pour faire un bon ménage. » 

POUR CONCLURE

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Cette fin du « Postambule » offre un double intérêt :

  • D’une part, il montre que, pour Olympe de Gouges, la situation de la femme, privée de liberté et de droits par les hommes, est semblable à celle des esclaves dans les colonies. Or, pour les unes comme pour les autres, les révolutionnaires tardent à corriger cette injustice.

  • D’autre part, il inscrit cette écrivaine dans les combats de ce "siècle des Lumières", notamment celui en faveur de l’abolition de l’esclavage, en recourant, comme les philosophes, à une argumentation qui s’appuie à la fois sur la raison, universellement partagée, et sur l’idée de « nature ».

Rappelons cependant qu’elle fait figure, parmi les révolutionnaires, de "modérée", puisqu’elle ne réclame pas la fin de la monarchie. C’est d’ailleurs son manifeste, Les Trois Urnes, affiché le 20 juillet 1793, dans lequel elle propose « le retour à une monarchie constitutionnelle », qui lui vaudra sa condamnation à la guillotine.

CONCLUSION sur l’œuvre d'Olympe de Gouges 

RÉPONSE À LA PROBLÉMATIQUE 

POUR CONCLURE

​

Cette fin du « Postambule » offre un double intérêt :

  • D’une part, il montre que, pour Olympe de Gouges, la situation de la femme, privée de liberté et de droits par les hommes, est semblable à celle des esclaves dans les colonies. Or, pour les unes comme pour les autres, les révolutionnaires tardent à corriger cette injustice.

  • D’autre part, il inscrit cette écrivaine dans les combats de ce "siècle des Lumières", notamment celui en faveur de l’abolition de l’esclavage, en recourant, comme les philosophes, à une argumentation qui s’appuie à la fois sur la raison, universellement partagée, et sur l’idée de « nature ».

Rappelons cependant qu’elle fait figure, parmi les révolutionnaires, de « modérée », puisqu’elle ne réclame pas la fin de la monarchie. C’est d’ailleurs son manifeste, Les Trois Urnes, affiché le 20 juillet 1793, dans lequel elle propose « le retour à une monarchie constitutionnelle », qui lui vaudra sa condamnation à la guillotine.

Conclusion

Un combat contre des adversaires

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Olympe de Gouges généralise son adversaire dans son introduction, sous-titrée « Les droits de la femme », en l’interpellant, « Homme, es-tu capable d’être juste ? » Mais, derrière ce terme, se cachent des adversaires précis.

         Comme c’est dans le cadre de la famille et du mariage que se manifeste l’oppression de la femme, les premiers coupables sont le père, qui, après lui avoir refusé une réelle instruction, marie souvent sa fille contre sa volonté, mais surtout « son mari, son chef, son seigneur et son maître », pour reprendre l’énumération d’Arnolphe dans L’École des femmes qui traduit l'absolu pouvoir de l'époux sur sa femme. C’est d’ailleurs ce qui explique qu’à la fin du « Postambule », elle passe du combat des femmes à celui des esclaves, car tous deux sont, à ses yeux, asservis de la même façon.

          Quand elle recherche les causes de cette situation, héritage des temps les plus reculés, elle pose une deuxième catégorie d’adversaires, tous ceux qui s’appuient sur la religion pour cautionner l’infériorité de la femme, descendante d’Ève, dotée de si nombreux défauts, comme, d’ailleurs, celle des esclaves « de couleur noire ». Finalement, c’est toute la société qui, à partir de cette conception, rejette les femmes dont la vie n’est pas conforme à la « vertu » chrétienne, telles ces filles-mères, séduites puis abandonnées, ou, tout simplement, celles qui sont nées dans des familles pauvres, sans ressources pour survivre.

        Ce constat implique un troisième adversaire, le législateur, puisque c’est lui qui a produit des textes de lois déniant à la femme les droits qu’il accorde à l’homme, notamment en matière politique, juridique, financière et en leur refusant le divorce. Elle accuse donc avec force les représentants du peuple à l’Assemblée d’être « en contradiction avec leurs principes ».

        Enfin, coupable aussi – et sans doute est-ce là le pire ! – la femme elle-même à laquelle elle crie : « Femme, réveille-toi ». Elle reproche aux femmes de rester passives face aux injustices subies : « Femmes, quand cesserez-vous d'être aveugles ? » Certes, elles ont des excuses et tout un paragraphe montre comment les femmes ont pu exercer un pouvoir souterrain sous l’Ancien Régime : « La contrainte et la dissimulation ont été leur partage. Ce que la force leur avait ravi, la ruse leur a rendu ». Mais il n’est plus temps, à ses yeux, d’agir ainsi ; elles doivent à présent affirmer ouvertement leur puissance et leurs droits.

Les droits revendiqués

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Les articles de sa Déclaration, en reprenant ceux de la Déclaration de 1789, réclament le respect des trois principes fondateurs de la Révolution : liberté, égalité, fraternité.

  • Ils doivent d’abord être appliqués dans le domaine politique, comme l’indique le titre de l'œuvre qui introduit « la citoyenne », en accordant aux femmes le droit de participer, comme tout homme, aux assemblées qui font la loi, « le droit de monter à la tribune ».

  • Puis, ils doivent s’exercer dans l’ensemble de la société, en lui ouvrant des charges dans « l’Administration publique », donc le droit de travailler, de participer au développement économique du pays. Mais, pour cela, la femme doit avoir le droit à une solide instruction, égale à celle des hommes.

  • Ce sont aussi des droits économiques et financiers, la participation à l’impôt et à son contrôle, mais aussi la gestion de sa propre fortune, y compris en cas de divorce.

Les formes et les procédés du combat

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Les analyses nous ont permis de constater qu’Olympe de Gouges met en œuvre toutes les stratégies oratoires propres à rendre son argumentation efficace.

Pour convaincre

Elle veille à opposer, aux arguments des adversaires, ses propres arguments, construits avec rigueur et logique, exposés en faisant appel à la « raison », comme l’ont fait les écrivains des Lumières. Elle joue ainsi sur les oppositions, par exemple entre la conception traditionnelle des femmes et ses propres souhaits ; elle pose les causes de ce qu’elle dénonce, pour en dépeindre les conséquences. Elle imagine les obstacles, avec des hypothèses, pour expliquer ensuite comment les surmonter.

Cette volonté de convaincre se mesure tout particulièrement aux ajouts qu’elle introduit dans les articles de sa Déclaration par rapport au texte « masculin ».

Pour persuader

Elle joue sur une double tonalité, liée à son implication personnelle.

         Nous reconnaissons la tonalité pathétique quand elle peint la situation des femmes, comparée à celle des esclaves. Nous percevons alors sa sensibilité, toute son émotion à travers le lexique qui met en valeur leur sort, en insistant sur « l'effroyable tableau de ce qu’[elles ont] été dans la société ».

         Mais les textes s’inscrivent encore davantage dans la tonalité polémique, qui traduit toute son indignation. Le blâme ressort de la violence lexicale, avec de nombreuses hyperboles soutenues par des images, comparaisons et métaphores péjoratives. Si les articles sont des affirmations ou des négations, plus neutres, le « Préambule » comme le « Postambule », et même la « Dédicace » interpellent très souvent, à la fois les adversaires mais plus largement tous les lecteurs, par des interrogations rhétoriques, par les injonctions qu’elle leur lance. Et son élan de colère se marque dans le rythme même des phrases, avec l’emploi de chiasmes, d’anaphores, d’énumérations ou de longues périodes enflammées.

Choderlos de Laclos, De l'Education des femmes, 1785

DEVOIR : le commentaire littéraire 

Pour lire le texte 

Est proposé de rédiger le commentaire d'un court extrait de De l'Éducation des femmes, discours composé par Choderlos de Laclos en réponse à une question proposée par l'Académie de Châlons-sur-Marne, et paru en 1785. 

Pour voir le corrigé proposé 

HISTOIRE DES ARTS : François Biard, L'abolition de l'esclavage, 1848 

Un diaporama d'analyse 

En 1794, après les révoltes dans les colonies et pour répondre aux principes qui la soutiennent, la Révolution française abolit en 1794 l’esclavage. Mais il est rétabli par Napoléon en 1802, avant que la IIIème République, par son décret de 1848, ne redonne officiellement leur liberté aux esclaves des colonies. C’est ce qu’illustre le tableau de François Biard, qui vise à donner l’image d’une fraternité nouvelle dans la société coloniale.

François Biard, L’Abolition de l’esclavage dans les colonies françaises en 1848, 1849. Huile sur toile, 260 x 392. Musée de l’Histoire de France, Château de Versailles

François Biard, L’Abolition de l’esclavage dans les colonies françaises en 1848, 1849. Huile sur toile, 260 x 392. Musée de l’Histoire de France, Château de Versailles
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