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Le moyen âge, au-delà des préjugés...

Le contexte socio-historique

Traditionnellement, on nomme "moyen âge" la période qui va de la chute de l'empire romain d'Occident, en 476, à la prise de Constantinople par les Turcs, en 1453. Complexes, ces temps sont loin d'être les siècles "obscurs" qu'on a souvent  imaginés.

 

La foi chrétienne

L'Eglise exerce alors sa suprématie. Elle est active pour secourir le peuple, dans les asiles et les hôpitaux. Les monastères se multiplient, et, au-delà de la prière, les moines s'occupent aussi d'agriculture, de justice, d'éducation : en copiant les manuscrits, ils préservent un riche patrimoine.

 

Les croisades

A l'appel du pape, en 1095, la 1ère croisade provoque un élan de foi, et la 2ème permet la prise de Jérusalem. Mais, peu à peu, les échecs se multiplient, et les six autres croisades s'éloignent de leur but initial, libérer la terre sainte, pour devenir des prétextes aux pillages et au déchaînement de la barbarie. Cependant, elles entraînent aussi un essor du commerce avec l'Orient, d'où les croisés rapportent des raffinements nouveaux et de nombreuses connaissances, scientifiques notamment. Enfin, en unissant les seigneurs autour d'un objectif commun, elles affaiblissent la féodalité et renforcent le pouvoir royal.

 

Le temps des cathédrales

De la robuste sobriété des églises romanes, bien ancrées dans le monde rural, à l'élégance des hautes cathédrales gothiques, qui, dans les villes dressent leurs flèches vers le ciel, elles symbolisent la toute-puissance de l'Eglise : le XIII° siècle marque l'épogée de leur construction. Ce sont aussi des lieux d'art, avec les vitraux, les sculptures, autant de moyens d'apprentissage pour le peuple.

La féodalité

Le système féodal organise le pouvoir. Il repose sur le code de la chevalerie. La cérémonie de l'adoubement, avec son serment solennel, met le chevalier, possesseur d'un cheval et d'un armement complet, au service, en tant que vassal, de son suzerain, qui lui accorde un territoire, son fief, et sa protection. Ces seigneurs mènent souvent, dans leur château, une vie fastueuse avec leur cour : fêtes, chasses, tournois, autant d'occasions de réjouissances...  

Tous les paysans, qu'ils soient "vilains", c'est-à-dire libres, ou "serfs", attachés à la terre qu'ils cultivent, dépendent du seigneur auquel ils doivent, en échange de la protection du château en cas d'attaque, redevances et corvées. Guerres, famines, épidémies... leurs conditions de vie sont très dures, et conduisent parfois à des jacqueries, émeutes ainsi nommées d'après un prénom paysan fréquent, "Jacques". Cependant la période connaît aussi d'importants progrès utiles à l'agriculture, par exemple l'attelage animal, qui libère les paysans de tâches pénibles, ou l'usage des énergies éolienne et hydraulique, avec la construction des moulins.

 

L'essor des villes

Avec l'amélioration des transports, terrestres et maritimes, le commerce connaît un important essor, qu'il s'agisse de grandes foires ou de petits marchés, actifs dans les villes. Ainsi les villages s'étendent, deviennent des bourgs qui s'enrichissent, s'abritent derrière une enceinte, construisent leur église : les artisans et les marchands prospèrent. Une nouvelle classe naît alors, celle des bourgeois, qui vont jouer un rôle de plus en plus important.

Les chansons de geste
ChansonGeste

Du latin "gesta", actes accomplis, les chansons de geste relatent les exploits d'illustres personnages, historiques, tels Charlemagne et ses douze pairs, ou légendaires, tels les chevaliers de la table ronde, autour du roi Arthur. Elles popularisent le code d'honneur de la chevalerie. Composées du XII° au XIV° siècle, accompagnées d'une mélodie simple, elles s'inscrivent dans le registre épique. Elles montrent, en effet, la foule des combattants, unis et conquérants, et le public y admire la force d'un héros au courage surhumain, qui accomplit des prouesses exceptionnelles. Il est animé par une foi profonde, prêt à accepter la mort au service de son seigneur et de son dieu.

Un site et une tapisserie pour découvrir la Chanson de Roland : cliquer sur l'image
La Chanson de Roland : tapisserie
... et une remarquable exposition de la BnF : cliquer sur le lien

Transmise oralement avant d'être fixée par écrit vers 1090, les 4000 vers de la Chanson de Roland racontent un fait historique datant de 778. Parti pour conquérir l'Espagne, Charlemagne,  échoue devant la cité de Saragosse, et envoie Ganelon pour négocier avec le roi, sarrazin. Mais Ganelon trahit l'empereur, qui doit repasser les Pyrénées. Au col de Roncevaux, l'arrière-garde de l'armée est attaquée, et Roland, neveu de Charlemagne selon la légende, résiste fermement. Il meurt en sonnant du cor pour avertir le roi, après avoir tenté, en vain, de briser son épée, Durandal. [cf. extrait ci-contre]

Lire un extrait de la Chanson de Roland
La satire

La vie est rude au moyen  âge, les hommes y sont confrontés à la violence, à la famine, aux épidémies... En réponse, le rire se donne libre cours dans la littérature, sous la forme du comique le plus grossier parfois, avec des jeux sur le langage, mais aussi pour faire la satire de ceux qui oppriment le peuple.

Le Roman de Renart
Pour découvrir Le Roman de Renart, un site de la BnF avec une vidéo et  un manuscrit à feuilleter :  cliquer sur l'image.
Le Roman de Renart

Héritage des fables animalières du grec Esope ou du latin Phèdre, le Roman de Renart, recueil composé entre 1170 et 1250, raconte, en 27 poèmes appelés "branches", les aventures de Renart, nom propre de l'animal alors nommé "goupil", un des personnages de la cour de Noble, le lion. On y découvre un personnage rusé, parfois jusqu'à la malhonnêteté, qui manie avec habileté le langage et réussit à échapper aux rivalités. Il triomphe toujours dans ses luttes avec son "oncle" Ysengrin, le loup [cf.texte ci-contre].

Au-delà du rire provoqué par ces animaux caricaturés, ceux-ci permettent une satire féroce de la société féodale : elle s'exerce contre les abus des puissants seigneurs, dénonce leurs injustices, mais aussi dans le domaine religieux, se moque des moines, des pélerinages... La parodie y est fréquente, celle des chansons de geste comme celle des codes de l'amour courtois.

Lire un extrait du Roman de Renart  : cliquer pour agrandir.
Sous forme de récit : le fabliau

Les fabliaux, écrits du XII° au XIV° siècle, sont de courts récits divertissants. Ils plaisent à tous les publics, car ils utilisent tous les procédés pour faire rire : les coups de bâton, les jeux sur les mots, quiproquos et allusions souvent grivoises, les malentendus et les situations cocasses. Ils n'hésitent pas à rire des plus faibles, se moquent ouvertement des femmes, de leur bavardage, de leur infidélité, de la naïveté des paysans, de la gourmandise des prêtres... Au-delà du rire, ils visent aussi à transmettre une morale.

Lire un fabliau de Cortebarbe, Les trois aveugles de Compiègne  : cliquer sur l'image.
Le fabliau : Cortebarbe
Au théâtre : la farce

Au XIII° siècle, on peut véritablement parler d'une renaissance du théâtre comique, notamment avec le Jeu de la Feuillée ou le Jeu de Robin et Marion d'Adam de la Halle. Le comique prend des formes diverses : des monologues dramatiques parodient les sermons, les "moralités" et les "soties" sont autant de satires... 

Une des pièces comiques les plus connues est la Farce de maître Pathelin (vers 1465), dont l'auteur est anonyme. Son thème est simple : le trompeur au beau langage, l'avocat Pathelin, se retrouve trompé par son client, le naïf berger Agnelet. Cette critique de la fourberie,  ridiculise aussi le fonctionnement de la justice.

Découvrir La Farce de maître Pathelin  : cliquer sur les liens

- le texte intégral en français modernisé [doc. Pdf]

- un site très complet, avec un extrait vidéo

Fabliau
L'esprit courtois
Courtois
Le roman d'amour et d'aventure
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Dès la 2nde moitié du XII° siècle, sous l'influence de l'Orient, les seigneurs mènent une vie plus raffinée et plus mondaine, d'abord dans les cours du sud, telle celle d'Aliénor d'Aquitaine, puis dans celles du nord, par exemple en Champagne. Cela entraîne une évolution des goûts littéraires : l'amour prend une place primordiale dans les récits. Ainsi, le chevalier se met au service de la "dame", sa suzeraine, c'est pour elle qu'il combat à présent, c'est à elle qu'il obéit, suivant le code subtil de la "fin' amor" et les interdits qu'il lui impose.

Tristan et Iseut

Tristan de Léonois, Tristant et Iseult buvant le philtre magique, 1470. Miniature extraite du livre de Lancelot du lac, version attribuée à Gautier Map. BnF, Paris.

Pour découvrir Tristan et Iseut, un site de la BnF avec un manuscrit à feuilleter :  cliquer sur l'image.
Amour courtois

La légende de Tristan et Iseut, "beau conte d'amour et de mort", d'abord orale, est écrite en prose vers 1170 par le trouvère Béroul, puis reprise, avec des variantes qui multiplient les aventures du héros, par Thomas d'Angleterre. L'ouverture du récit résume son contenu : "Ecoutez comment à grand'joie, à grand deuil ils s'aimèrent, puis en moururent en même jour, lui pour elle, elle pour lui." Ainsi se crée le mythe de l'amour éternel, et fatal.

Tristan, blessé après avoir tué le Morholt, le géant qui dévaste l'Irlande, est soigné par Iseut la blonde, la fille du roi, mais rentre en Bretagne auprès du roi Marc, son suzerain. Celui-ci le charge de lui ramener Iseut, qu'il veut épouser. Mais, lors d'une tempête sur la nef du retour, Tristan et Iseut boivent le "vin herbé", philtre d'amour destiné aux futurs époux. Cela scelle leur amour indestructible, jusqu'au-delà de leur mort. [cf. texte ci-contre.]

Lire un extrait de Tristan et Iseut : la mort  des amants.
Chrétien de Troyes

Les oeuvres de Chrétien de Troyes, Lancelot ou le Chevalier de la charrette (vers 1168) ou Yvain ou le Chevalier au lion (vers 1170) illustrent cette image du chevalier d'une fidélité parfaite à sa dame. Mais, dans Perceval (vers 1182), il revient aux légendes celtiques, organisées autour du roi Arthur et de ses chevaliers de la Table ronde, en montrant les épreuves surmontées par le héros dans sa quête du vase sacré, le Graal. 

Même si ces récits dépeignent de façon souvent pittoresque et réaliste la société et les moeurs de leur temps, ils s'inscrivent encore dans le registre merveilleux. Le chevalier, aidé par des moyens magiques, entre dans un univers féérique, découvre une nature étrange, peuplée d'êtres surnaturels. [cf. texte ci-dessous.]

Lire un extrait d'Yvain ou le Chevalier au lion.
Pour découvrir Chrétien de Troyes et son oeuvre, un dossier de la BnF : cliquer sur l'image.
La Dame à la licorne: tapisserie

"Mon seul désir", dernier des six panneaux composant la tapisserie de La Dame à la licorne, fin XV° siècle. Musée national du moyen âge, Hôtel de Cluny, Paris.

Dans la poésie
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L'amour prend des formes variées dans la poésie, chantée en langue d'oc par les troubadours dans les cours du sud, en langue d'oïl par les trouvères au nord.

La "chanson de toile", ainsi nommée parce que les dames la chantaient en filant, tissant ou brodant, évoque souvent un drame d'amour : la dame se plaint de l'éloignement de son ami, parti à la croisade, voire de sa mort, comme dans "Belle Doette" [cf. Texte ci-contre]. Tandis que la "reverdie" montre la joie d'aimer qui renaît avec le printemps, l'"aube", elle, correspond à la séparation des amants après leur nuit d'amour. La "pastourelle" met en scène la bergère innocente que le seigneur cherche à séduire.

La chanson de toile
"Cardage, filage et tissage", Illustration tirée de Boccace.

Cardage, filage et tissage, XV° siècle. Illustration tirée de Boccace, Le livre des femmes nobles et renommées, BnF.

Le concert champêtre, vers 1500. Tapisserie, Flandres ou nord de la France. Musée du Louvre, Paris.

"Le concert champêtre", tapisserie, vers 1500.
Lire une chanson de toile : "Belle Doette".
Le lai
Genre musical à l’origine, accompagné de la harpe par les bardes bretons notamment, le lai, construit en octosyllabes à rimes plates, conserve sa force poétique, tout en devenant, au XII° siècle, narratif, s’allongeant de cent à mille vers. C’est Marie de France qui, entre 1160 et 1178, lui donne ses lettres de noblesse. Peut-être cette poétesse, dont on reconnaît l’immense culture, y compris dans les lettres latines, a-t-elle vécu en Angleterre, on ne sait pas grand-chose d’elle, sinon qu’elle se désigne comme « de France ». La réussite de ses douze lais, regroupés en un recueil, vient de la façon dont elle mêle la dimension mythique, empruntée aux légendes celtiques ou arthuriennes, et les codes de l’amour courtois. Elle unit ainsi le surnaturel, fées, métamorphoses, personnages venus d’un « ailleurs » mystérieux… , à la recherche de l’expression élégante du sentiment amoureux.
C’est aussi le code de la fin’amor qu’illustre Jean Renart dans son Lai de l’ombre au début du XIII° siècle.
Marie de France, manuscrit BnF

Marie de France. Manuscrit enluminé. BnF.

Le lai lyrique ne disparaît  pas pour autant, pratiqué, par exemple par Guillaume de Machaut (vers 1300-1377), qui compose aussi de nombreux « Dits », autre forme de récit poétique, et des rondeaux, ballades, virelais…

"Les Lais", Marie de France
Pour lire les "lais" de Marie de France: cliquer sur l'image.

Danse macabre de l'église Saint-Germain de la Ferté-Loupière, fin XV° siècle. Détail de la fresque murale.

Gisant d'albâtre attribué à l'évêque de Narbonne,

XIII° siècle. Basilique de Carcassonne

Danse macabre du cloître des Saints Innocents, Paris. Une des 17 gravures sur bois publiées en 1885 par Marchant et Vérard.

Le pathétique
Au théâtre : "miracles" et "mystères"

Dans ce contexte social difficile, la littérature accorde une place importante à la mort : de nombreuses oeuvres, dans une optique chrétienne, rappellent le néant de la vie terrestre et appellent à méditer sur l'au-delà.

 

Les "miracles"

 

Ainsi, dès la fin du XII° siècle, sont joués, d'abord à l'intérieur des églises, puis sur leur parvis, les "miracles". Ces pièces de théâtre racontent des épisodes de la vie des saints, montrant comment ils interviennent dans les affaires humaines, pour sauver les pécheurs repentis. Par exemple, le Miracle de Saint Théophile, composé par Rutebeuf vers 1260, met en scène Théophile d'Adana, qui, après avoir vendu son âme au diable, est sauvé par l'intercession de la Vierge.

Car, comme tous ceux d'Adam nés

Ont péché jusqu'à vous et moi,

Moi, qui l'humanité reçois

Pour tous les humains délivrer,

Dois sur tout mon corps endurer

Excessive peine et amère ;

Oyez Isaïe, ma mère,

Résignez-vous à ses paroles ; [...]

Il dit que je serai blessé

Tant, que de la plante du pied

Jusqu'à la tête, part hautaine,

Il ne restera partie saine

Qui n'ait souffrance, n'ait détresse.

Les "mystères"

 

Après la guerre de Cent Ans, se popularisent les "mystères" (du latin "ministerium") qui ont pour fonction de représenter des scènes de l'Ancien et du Nouveau Testament. Un des sujets fréquents est la passion du Christ, pour inciter le public, qui contemple cette agonie, à espérer en sa rédemption. Ainsi le Mystère de la Passion de Gréban, écrit vers 1450, présente, en plus de 34000 vers, les étapes de la vie du Christ qui conduisent à sa mort sur la croix, puis à sa résurrection. Dans un passage, il dialogue avec sa mère, qui voudrait écarter de lui la douleur, et lui explique qu'il lui faut obéir aux ordres divins. [cf. Extrait ci-contre.]

Le Noir, Crucifixion du Christ qui montre sa plaie de côté, 1348-1349. Enluminure sur parchemin, 12,6 x 8,8. Metropolitan Museum of Art, New York. 

Dans la poésie
Rutebeuf : vers 1230-1285

Ce surnom, le "rude boeuf", qualifie un poète dont on ne sait pas grand chose : il a sans doute mené, à en juger par son oeuvre, la vie aventureuse des trouvères, tantôt protégé par un puissant, tantôt connaissant le froid et la misère.

Son oeuvre est très diversifiée, satire violente dans des pamphlets, "dits" ou "disputations", notamment des mensonges et de l'hypocrisie des riches et des hommes d'Eglise.

En dénonçant les multiples abus, et les douleurs des croisades, il fait aussi preuve d'une foi sincère. Mais l'on a surtout retenu de son oeuvre les poèmes lyriques, par exemple les Complaintes, plaintes personnelles (cf. extrait de "De la pauvreté Rutebeuf"  ci-dessous) ou déplorations réalistes des misères de son temps.

"La Complainte Rutebeuf", chantée par Léo Ferré.

Je n'ai ni couverture ni lit,

il n'est plus pauvre que moi d'ici à Senlis.

Sire, je ne sais où aller.

Mes côtes se frottent au paillis,

et lit de paille n'est pas lit,

et mon lit n'est fait que de paille.

Grand roi, si vous me faites défaut,

alors tous m'auront fait défaut,

                                    [sans exception.

La subsistance me fait défaut;

nul ne m'offre rien, nul ne me donne rien.

Je tousse de froid, je baille de faim,

je suis dans la détresse, à la mort.

François Villon : vers 1431-après 1463

Dès sa jeunesse étudiante, Villon acquiert sa réputation de "mauvais garçon" : en 1455, il doit s'exiler de Paris pour avoir tué un prêtre lors d'une bagarre. Après avoir obtenu la "rémission" de ce crime, un vol au collège de Navarre l'oblige à un nouvel exil. Il a dû mener une vie errante, tantôt protégé, par exemple par le duc d'Orléans, tantôt lié aux malfaiteurs dont il partage la misère et le langage argotique.

Il évoque, en effet, souvent sa pauvreté, comme dans son "Epître à ses amis", ci-dessous. En 1462, arrêté pour avoir participé à une rixe, qui a blessé un notaire pontifical, il est condamné à la pendaison : sans doute écrit-il alors son "Epitaphe Villon" ou "Ballade des pendus", qui présente une image saisissante de la mort. Sa peine est changée, en 1463, en 10 ans de bannissement, mais sa vie ultérieure reste ignorée.

Venez le voir en ce piteux arroy,

Nobles hommes, francs de quars et

                                                         |de dix,

Qui ne tenez d'empereur ne de roy,

Mais seulement de Dieu de Paradiz ;

Jeuner lui fault dimenches et merdiz,

Dont les dens a plus longues que

                                                        [ratteaux

Aprés pain sec, non pas aprés gasteaux,

En ses boyaulx verse eaue a gros            

                                                              [bouillon,

Bas en terre - table n'a ne tresteaux -.

Le lesserez la, le povre Villon ?

"La Ballade des pendus", chantée par Léo Ferré.

Les grands rhétoriqueurs
Rhétoriqueurs
Guillaume de Machaut, Oeuvres poétiques, manuscrit.

Guillaume de Machaut, Oeuvres poétiques, vers 1355-1360. Manuscrit avec enluminure sur parchemin, 30 x 21. BnF.

C'est au XIX° siècle que l'appellation de "grands rhétoriqueurs" est attribuée à des poètes qui, aux XIV° et XV° siècles, partagent deux caractéristiques :

- Tous sont des "poètes de cour", c'est-à-dire protégés par un mécène, le duc de Bretagne, comme Jean Meschinot (1422-1491), le duc de Bourgogne, comme Jean Molinet (1435-1507), ou à la cour de France, comme Octavien de Saint-Gelais (1468-1502), pour n'en citer que quelques-uns. Ainsi, ils mettent leur oeuvre au service du puissant protecteur, en chantant leurs louanges : valeureux exploits, exceptionnelle noblesse, clairvoyance, générosité, justice et clémence, autant de qualités vantées pour la plus grande gloire des princes. En témoignent, par exemple, les titres de deux recueils de Meschinot, Poésies politiques et Les Lunettes des princes, et Saint-Gelais, pour sa part, développe de vibrants éloges de Charles V, Charles VII et Louis XI.

- Tous sont des "poètes du langage". D'une part, ils usent de tous les moyens pour l'embellir, notamment par des images, métaphores, animalisations, allégories... , et mettent en place des réseaux symboliques complexes, à partir des mythes anciens, de l'art du blason, de la cosmographie ou des éléments naturels. D'autre part, ils élaborent avec soin la versification, dans les genres courts qu'ils affectionnent tout particulièrement, tels le rondeau, la ballade, le lai, le virelai..., jouant sur les sonorités, faisant rebondir les syllabes, s'amusant à des acrostiches ou des épigrammes... Ils composent des "Traités" de versification, nombreux, après le premier d'entre eux, L'Art de dictier et de fere chançons, ballades, virelais et rondeaux (1393) d'Eustache Deschamps (1340-1404) ; le Recueil d'Arts de la seconde rhétorique en regroupe sept, tel celui intitulé "Des rimes" (vers 1400) de Jacques Legrand. Ils contribuent donc à fixer les normes de la versification.

Pour en savoir plus sur les rhétoriqueurs : cliquer sur l'image.
British Museum
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